Introduction
Outre le fleuve Niger, la région
de Gaya située au sud du pays dispose, de ressources
hydriques considérables. Ces dernières sont
principalement concentrées, dans deux vallées
fossiles (les dallols Fogha et Maouri) où se trouve
une centaine de mares temporaires ou permanentes. Ce potentiel
est très peu utilisé à des fins agricoles
: jusqu'à une date récente, l'eau était
en effet exploitée uniquement sous formes de cultures
de décrue pour des productions de contre-saison et
pour la production fruitière cantonnée sur
le pourtour de certaines mares.
Cette situation est d'autant plus paradoxale
que le potentiel en matière d'irrigation est connu
de longue date. La mobilisation de l'eau a fait l'objet
de plusieurs programmes d'Etat de mise en place de grands
périmètres rizicoles dans la vallée
du fleuve Niger dont les résultats sont peu probants.
La zone d'étude a été sélectionnée
à la suggestion du bureau de coordination de la Direction
du Développement et de la Coopération suisse
au Niger (DDC). Active depuis plus d'une vingtaine d'année
dans la région de Gaya, la DDC a été
confrontée aux requêtes de nombreux producteurs,
soucieux de recevoir un appui financier dans le but d'exploiter
l'eau de surface et de sub-surface. Les programmes régionaux
de la DDC, le Programme d'appui au développement
local (PADEL) et le Fonds de soutien aux investissements
locaux (FSIL), n'ont pas donné suite à ces
requêtes du fait de la complexité des conflits
en matière d'utilisation de l'eau.
Les travaux menés dans le cadre
du programme ont confirmé le diagnostic des programmes
de la DDC. Les conflits fonciers et/ou d'accès à
l'eau entravent fréquemment l'extension de l'irrigation
sur le pourtour des mares : qu'il s'agisse de conflits entre
villageois, entre agriculteurs et éleveurs ou entre
producteurs et agents de l'Etat nigérien. L'étude
des transformations récentes met toutefois en évidence
des initiatives individuelles exploitant les nappes de sub-surface.
Il ressort en effet de l'analyse que, outre les mares, les
vallées fossiles sont caractérisées
par la présence de nappes situées à
quelques mètres de profondeur. Techniquement, cette
eau est facilement exploitable, à l'aide de notamment
de motopompes, permettant une diversification et une augmentation
sensible de la production agricole. Grâce à
sa position frontalière avec le Nigeria et le Bénin,
à sa proximité avec l'agglomération
de Niamey et au dynamisme de certains de ses acteurs économiques,
la région se situe à un carrefour de réseaux
commerciaux permettant l'écoulement de la production.
Les recherches effectuées dans
la région montrent que les conflits d'utilisation
de l'eau sont réels mais localisés et qu'il
existe une dynamique récente de mobilisation de l'eau
s'appuyant sur des réseaux de commercialisation des
productions agricoles. Ce dernier aspect mérite d'être
souligné car dans d'autres régions du Niger
l'accès au marché constitue un obstacle certain
en matière d'intensification de la production agricole.
La surestimation des contraintes liées
aux conflits, de la part des programmes de la DDC, n'est pas
sans conséquence. Du fait de leur position dominante
dans la région en matière d'appui au développement,
la politique ne non intervention dans le domaine hydro agricole
de ces programmes contribue à priver un grand nombre
de producteurs locaux des appuis financiers nécessaires
à la mobilisation de l'eau. Cette situation contribue
à la monopolisation de l'exploitation des eaux de sub-surface
par quelques investisseurs.
Si les populations locales peuvent difficilement exploiter
l'eau à des fins de production, elles sont par contre
directement affectées par les nuisances sanitaires
d'origine hydriques. Un grand nombre de pathologies sont en
effet directement lié à la contamination de
l'eau des mares et des puits. L'importance de ce facteur a
été largement sous-estimé, sinon ignoré,
par les projets de forages et d'aménagement de puits.
La vulnérabilité de la population face à
la maladie accentue sa précarité économique.
L'importance des dimensions sanitaires est mise en exergue
depuis de nombreuses années et semble faire l'objet
d'un consensus international. Sur le terrain la réalité
peut être toute autre.
Ronald Jaubert, Marika Bakonyi-Moeschler,
Olivier Walther |