La question de l'eau telle qu'elle était
posée à la fin des années 1970 a fait
place dans le discours international à " la
crise mondiale de l'eau ".
" En ce début du 21ème
siècle, la Terre et ses formes de vie diverses et
abondantes - notamment ses 6 milliards d'êtres humains
-, sont confrontées à une grave crise de l'eau.
Tous les signes suggèrent que cette crise s'intensifie
et que la situation continuera d'empirer tant qu'aucune
action corrective ne sera menée. " (UNESCO-WWAP
2003).
Le diagnostic se fonde sur la raréfaction
des ressources hydriques et les risques avérés
ou potentiels de pénuries. A l'horizon 2025, la quantité
d'eau exploitée au plan mondiale aura augmenté
de 40 % par rapport à 1995 et de 30 à 35 %
de la population mondiale sera confrontée à
une situation de déficit chronique d'eau douce (Shiklomanov,
1999).
L'urgence de la situation fait l'objet d'un
large consensus au plan international ainsi que les quatre
principes d'orientation des politiques définies lors
de la Conférence internationale sur l'eau et l'environnement
(Dublin, 1992).
Principes directeurs de la déclaration
de Dublin :
L'eau
douce est une ressource limitée et vulnérable,
essentielle à la vie, au développement
et à l'environnement.
Le
développement et la gestion des ressources en
eau doivent être basés sur une approche
participative incluant les utilisateurs, les planificateurs
et les responsables politiques, à tous les niveaux.
Les
femmes jouent un rôle crucial dans la fourniture,
la gestion et la protection de l'eau.
L'eau
a une valeur économique dans tous ses usages,
en concurrence l'un avec l'autre, et doit être
reconnue comme un bien économique. |
Ces principes sont repris dans le dernier
rapport mondial sur la mise en valeur des ressources en
eau (UNESCO-WWAP 2003). Ils constituent également
la base de la politique de l'eau de la Banque Mondiale structurée
autour des trois principaux axes suivants :
La mise en place de structures intégrées de
gestion des différents usages de l'eau à l'échelle
des bassins versants en réponse au problème
de fragmentation des institutions intervenant dans la gestion
des ressources hydriques.
La gestion participative, la décentralisation et
le recours au secteur privé dans le but d'améliorer
l'efficacité de la gestion.
Le payement de l'eau par les utilisateurs pour réduire
les gaspillages et réguler l'allocation entre ses
différents usages (World Bank, 1993, Petit, 2003)
La tarification de l'eau et, plus encore,
le recours au secteur privé sont l'objet d'une vive
controverse. Il n'en reste pas moins que les politiques
mise en place appliquent souvent ces principes ou s'en inspirent
pour répondre aux attentes des bailleurs de fonds.
Une des questions que soulève le programme
de recherche porte sur la validité du diagnostic
et des présupposés véhiculés
par les prescriptions. Le principe selon lequel l'eau doit
être reconnue comme un bien économique et que
les utilisateurs doivent la payer pour réduire les
gaspillages accrédite en effet l'idée selon
laquelle l'eau est généralement obtenue à
faible coût, sinon gratuitement, et qu'elle est gaspillée.
L'analyse de la Banque mondiale en matière
d'utilisation agricole porte sur des projets pour lesquels
elle est sollicitée, c'est-à-dire les programmes
publics d'aménagements hydro agricoles dans lesquels
les utilisateurs bénéficient souvent d'un
accès gratuit à l'eau ou de redevances réduites
qui ne sont fréquemment que partiellement recouvrées.
Les instruments de marchés peuvent, dans ces cas,
contribuer à réguler l'exploitation de l'eau
et à l'amélioration de l'efficacité
de son utilisation. Ceci ne leur confère pas pour
autant valeur de prescription universelle.
Nous pouvons faire l'hypothèse que
pour de nombreux agriculteurs, vraisemblablement la majorité
d'entre eux, l'accès à l'eau a un coût
significatif et que dans certains cas ce coût est
prohibitif. Il en est de même pour l'approvisionnement
en eau domestique. Dans ces circonstances, l'augmentation
des coûts et/ou les restrictions d'utilisation ne
peuvent que réduire l'accès à l'eau
là où un meilleur accès est généralement
une condition importante en matière de lutte contre
la pauvreté.
Ronald Jaubert
Références
Petit,
M., 2003, Développement durable à l'échelle
de la planète et gestion des ressources en eau et
en sols, in C. R. Géoscience, No335, Elsevier.
UNESCO-WWAP,
2003, Rapport mondial sur la mise en valeur des ressources
en eau, Ed. UNESCO.
http://unesdoc.unesco.org/images/0012/001295/129556f.pdf
Shiklomanov,
I.A. 1999, World Water Resources and Water Use. Present
Assessment and Outlook for 2025, State Hydrological Institute,
St Petersburg.
http://webworld.unesco.org/water
/ihp/db/shiklomanov/summary/html/figure_12.html
World
Bank, 1993, Water Resources Management, World Bank policy
paper.
http://lnweb18.worldbank.org/ESSD/ardext.nsf/
18ByDocName/ExecutiveSummaryofthe1993WaterPolicy/
$FILE/WRMExSumof1993WaterPolicy.pdf
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